"Le roman d'aventures ne se propose pas comme une transcription de la réalité. Il est un ouvrage artificiel dont aucune partie ne souffre d'être sans justification", écrit Jorge Luis Borges dans la préface qu'il donne, en 1940, à l'oeuvre de son ami Bioy Casares. Ainsi définit-il, aux antipodes de la peinture sociale ou psychologique, une esthétique dont se souviendra le "Nouveau Roman". L'Invention de Morel -dont Alain Robbe-Grillet devait tirer L'Année dernière à Marienbad- répond en tous points à ces exigences. Bioy Casares s'est plu à camper une situation défiant la raison : un fugitif, caché sur une île qu'il croyait déserte, y voit apparaître divers personnages qu'il suppose attachés à le découvrir et à le perdre. Pourtant, aucun d'eux ne semble même l'apercevoir. A cette énigme, l'intrigue apporte bel et bien une solution rationnelle, proche de la science-fiction. Mais au-delà d'un tour de force qui laisse derrière lui les meilleures réussites du roman policier, cette oeuvre vertigineuse vaut par la multiplicité de ses échos et de ses niveaux de sens : climat onirique d'une culpabilité kafkaïenne, troublante exploration du phantasme amoureux, réflexion métaphysique sur la circularité du temps, reflétée dans la clôture même de l'île et du texte.
Reviews with the most likes.
There are no reviews for this book. Add yours and it'll show up right here!