Habiter en lutte
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Zad de Notre-Dame-des-Landes. 40 ans de résistance
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Habiter en lutte : ZAD de Notre-Dame-des-Landes – 40 ans de résistance est un livre écrit par le collectif comm'un et publié en 2019 chez Le Passager Clandestin. Il raconte l'histoire de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, les quarante ans de lutte contre le projet d'aéroport.
Ses 256 pages sont découpées en 8 chapitres :
Histoire conflictuelle du bocage, avant les années 2000 : l'histoire du territoire du bocage autour de Notre-Dame-des-Landes, les premières annonces du projet d'aéroport au début des années 1970, les premières oppositions au projet, la création de la Zone d'Aménagement Différé et les mesures d'expropriation allant avec, puis l'enterrement du projet pendant plusieurs décennies
Un projet d'aéroport controversé, de 2000 à 2012 : la relance du projet d'aéroport en 2000 ; la renaissance des oppositions ; l'ouverture du débat public ; la bataille argumentative ; la diversité des opposants et de leurs moyens d'action
Naissance de la zone à défendre, de 2007 à 2012 : les premières installations illégales suite aux appels à occupation ; l'ancrage des occupants dans le territoire avec des auto-médias, une agriculture d'occupation, des habitations intégrées dans le territoire ; l'organisation de la défense du bocage ; les premiers mesures d'expulsion
Une tentative d'expulsion ratée, du 16 octobre au 24 novembre 2012 : l'opération César, l'usage de la force, la guérilla bocagère, l'art de la barricade ; la manifestation de réoccupation, l'opération Astérix, la défense des tracteurs ; l'enlisement de l'opération César, l'intensification de la répression et finalement les effets contraires de l'opération César, qui devait vider la ZAD et a fédéré les opposants au projet face à la violence des expulsions
Le bocage sous occupation militaire, du 25 novembre 2012 au 19 avril 2013 : la vie entre les checkpoints ; la diversité toujours accrue des occupants, la ZAD comme refuge, les espaces d'organisation du mouvement ; l'espoir d'un départ des forces de l'ordre
Vivre ensemble et sans Etat, d'avril 2013 à décembre 2015 : une occupation complexe, avec la question de construire pour rester, les tensions entre des occupants aux approches et aux idéologies différentes, notamment autour de la “route des chicanes” entre paysans et occupants venus d'ailleurs ; la force du collectif, l'organisation par lieu de vie et à l'échelle d'un territoire, la création d'un imaginaire commun ; les outils de l'autonomie : cultiver ensemble, la récup' et les chantiers collectifs, inventer et dessiner son territoire
L'enracinement d'un “habiter en lutte”, de décembre 2015 à janvier 2018 : l'opposition jamais à court d'idées : la manifestation sur le pont de Cheviré sur le périphérique nantais, les polémiques autour du périmètre géographique de la consultation sur le projet d'aéroport, limitée à la Loire-Atlantique ; l'organisation collective : prises de décision sur la ZAD, limites à la violence, bases communes pour l'avenir de la ZAD ; construire du “commun” : les nouveaux communaux, les projets agricoles, les constructions en dur ; l'extension des champs de lutte, notamment dans le cortège de tête des manifestations contre la loi Travail
Rien n'est fini, et tout commence !, depuis 2018 : l'ivresse de la victoire suite à l'annonce de l'abandon du projet d'aéroport, la gueule de bois avec le retour des tensions entre les factions de l'opposition à l'aéroport, la nouvelle vague, la légalisation de certains occupants, et le refus par d'autres d'entrer dans le jeu de l'Etat, et les doutes sur l'avenir du territoire de la ZAD
Ce livre est passionnant, il raconte parfaitement l'histoire de la lutte autour de Notre-Dame-des-Landes, avec toutes ses composantes : les pouvoirs publics, les entreprises en charge du projet, les paysans attachés à leurs terres dont ils vivent, les habitants historiques expropriés, les nouveaux venus qui sont arrivés pour lutter contre le projet d'aéroport et le modèle de société capitaliste.
Ce qui m'a particulièrement intéressé, c'est la description de l'organisation de la vie au sein de la ZAD, avec ses modèles alternatifs, certes imparfaits mais qui ont le mérite d'exister. La ZAD m'apparait comme un laboratoire d'expérimentation d'autres modèles de société, une expérience grandeur nature d'une société non capitaliste et basée sur l'entraide, la solidarité, le refus de toute domination ou oppression.
Le dernier chapitre et la conclusion posent d'ailleurs une question essentielle : comment faire vivre ces nouveaux modes de vie sur le territoire après la fin de la lutte, comment éviter les conflits internes quand les enjeux de chacun divergent, comment maintenir cet état esprit après la “victoire” ?